Une population isolée et vulnérable, cumulant les difficultés
Sur le lac du Tonlé Sap, reconnu réserve de biosphère par l’Unesco, flottent de nombreux villages qui se déplacent en fonction du niveau d’eau et des saisons. Les familles vivant sur et autour du lac sont essentiellement des familles de pêcheurs et vivent presque uniquement de cette activité.
Les populations vivant sur le lac dans des maisons flottantes cumulent les difficultés. Etant fortement isolées (plus d’une heure de piste – parfois impraticable – puis au moins 2 heures de bateau), elles ont un accès très limité aux services éducatifs et de santé : les taux d’illettrisme et d’abandon scolaire sont très élevés (près du ¼ des enfants ne va pas à l’école car il n’y a pas de moyen de déplacement sur le lac, le taux d’abandon scolaire est particulièrement élevé à partir du niveau 3 – équivalent du CE2), les problèmes d’hygiène et de santé sont multiples. De plus, ces populations font face à des difficultés économiques dues à la pêche intensive et la pollution. Il devient difficile pour ces familles de dégager un revenu suffisant par la pêche pour subvenir à leurs besoins tout au long de l’année. La nécessité de se convertir à d’autres activités génératrices de revenu devient un enjeu crucial pour les années à venir et donc le besoin de s’informer et de développer de nouvelles compétences est primordial.
Sur le lac, l’année scolaire est différente des autres écoles publiques avec des vacances de février à avril car, en saison sèche, il est très difficile pour les élèves de se rendre à l’école : les maisons sont dispersées, éloignées de l’école et les enfants sont à ce moment-là réquisitionnés par leurs parents pour aider à la pêche et à la culture. De nombreux villages flottants ne disposent d’aucune école. Pour les villages qui en comportent une, la majorité des écoles sont très pauvres, le niveau éducatif est très faible, l’abandon scolaire après le niveau 3 fréquent et le taux d’illettrisme très élevé. La difficulté provient aussi du grand turn-over des professeurs, qui – venant d’autres zones de la province – ne sont pas habitués à la vie lacustre et quittent leur poste après une ou deux années d’enseignement.
Le gouvernement Cambodgien – soutenu entre autre par l’UE, la Banque Mondiale et la coopération Japonaise – a décidé de relocaliser tous les villages flottants sur les berges du fleuve, du lac et des affluents dans les prochaines années. Or les habitants des villages flottants n’ont jamais vécu sur terre, y sont très réticents et ne connaissent qu’un seul métier ; la pêche. Il est donc nécessaire d’apporter des solutions d’accompagnement pour aider les jeunes à se relocaliser dans les années à venir.
Le projet
Le projet s’inscrit dans les politiques d’éducation non formelle menées par le Ministère de l’Education, de la Jeunesse et des Sports Cambodgien, en contribuant à la lutte contre l’échec et l’abandon scolaire ainsi qu’à l’accompagnement des campagnes d’alphabétisation menées sur le territoire. L’éducation non formelle et l’éducation primaire sont indispensables et complémentaires.
La première phase de lancement du projet a eu lieu en 2020. Le biblio-bateau est maintenant opérationnel depuis presque deux ans dans la commune de Phlov Touk, d’abord sur le lac auprès des habitants des maisons flottantes des six villages, puis une fois les villages de la commune relocalisés (période non fixée), les interventions se poursuivront en s’adaptant à la nouvelle configuration des villages aux maisons fixes sur pilotis, le site restant inondé plus de 6 mois de l’année. En 2022, le biblio-bateau se dotera d’une biblio-moto. Le biblio-bateau sillonne des villages cibles pendant la période des crues et la biblio-moto les dessert pendant la saison sèche. Ce nouveau mécanisme permet d’atteindre tous les villages cibles.
Le biblio-bateau agira sur trois volets en proposant des services variés et adaptés aux besoins : le développement de la lecture, le soutien à l’éducation de base et la sensibilisation aux problématiques sociales rencontrées par ces populations :
- activités de lecture pour les enfants des villages
- activités d’éveil pour les enfants en maternelle
- prêt de livres aux enfants et adultes
- activités éducatives complémentaires aux programmes scolaires et aux classes d’alphabétisation
- animation de sessions autour de problématiques sociales auprès des communautés (nutrition, santé, hygiène, planning familial, gestion du budget familial…).